Civ. 1, 3 novembre 2021, n°20-50.005
M. [Y], se disant né le 29 août 1982 au Sénégal, a souscrit une déclaration acquisitive de nationalité française en raison de sa possession d'état de Français dont l'enregistrement lui a été refusé.
Au soutien de sa demande, il invoque son acte de naissance. Cet acte de naissance avait été dressé par un jugement supplétif de naissance sénégalais 10 ans après sa naissance. Or, le demandeur ne produit au débat que son acte de naissance sans produire le jugement supplétif.
Il arrive fréquemment en pratique, qu'un étranger n'ait pas au moment de sa naissance un acte d'état civil. Il doit donc demander un jugement supplétif dans son pays d'origine. Il semblerait qu'en l'espèce, plusieurs décisions soient intervenues, tant supplétive que rectificative.
La question est donc de savoir si l'acte de naissance étranger établi par jugement supplétif suffit à lui seul à établir l'état civil ?
Selon la Cour d'appel, la production de l'acte de naissance suffit.
La Cour de cassation casse au visa de l'article 47 du Code civil.
En vertu de ce texte : tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.
La Cour de cassation énonce alors qu'un acte de naissance dressé en exécution d'une décision de justice est indissociable de celle-ci, dont l'efficacité, même si elle existe de plein droit, reste toujours subordonnée à sa propre régularité internationale.
Ainsi, pour les actes d'état civil établis par un jugement supplétif ou modifié par un jugement rectificatif, il faudra produire le jugement en plus de l'acte de naissance.
En effet, l'acte d'état civil est subordonné à la régularité du jugement supplétif ou rectificatif. Il faut donc que les autorités françaises soient en mesure de vérifier cette régularité.
Comme il a été relevé, « lorsque la filiation résulte d'un jugement supplétif étranger d'acte de naissance, la difficulté vient de la nature mixte, pourrait-on dire, de ce jugement, à la fois jugement et acte de l'état civil » (P. Lagarde, « Nationalité – Attribution de la nationalité française d'origine », Répertoire civil, n°128).
La solution n'est pas nouvelle mais il s'agissait d'arrêts d'espèce ( Civ. 1, 30 janvier 2020, n°19-23244, Civ. 1, 4 décembre 2019, n° 18-50040).
Ainsi, la Cour de cassation confirme par un arrêt de principe que l’acte de naissance étranger sera probant au sens de l’article 47 du Code civil si le jugement supplétif est produit et remplit les conditions de régularité internationale.
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