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Droit international privé

Actualité, Analyse et commentaire proposés par

Hélène Péroz

Professeure agrégée en droit privé et sciences criminelles à la faculté de droit de l'Université de Nantes

Of counsel  dans le cabinet d'avocats BMP et associés

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  • Photo du rédacteurheleneperoz

Une décision étrangère relative à une GPA exécutoire en France ne produit pas les effets d’une adoption plénière


Civ. 1, 2 octobre 2024, n° 23-50.002



 

La Cour de cassation a rendu deux arrêts le 2 octobre 2024 concernant l’exequatur de décisions étrangères relatives à des gestations pour autrui effectuées à l’étranger.

 

Ces deux arrêts font l’objet d’un communiqué de la Cour de cassation.

 

 

La question à laquelle répond la Cour de cassation dans cette espèce est de déterminer les effets que produit en France une décision étrangère relative à la GPA qui a bénéficié d’un exequatur.


Un jugement prénatal rendu le 5 juin 2019 par la cour supérieure de l'Etat de Californie pour le comté de [Localité 3] les déclare parents légaux de l'enfant dont Mme [H] allait accoucher, dit que Mme [H] et son époux, M. [H], ne sont pas les parents légaux de l'enfant, qu'ils ne sont tenus à aucune obligation à son égard et que toute présomption de maternité ou de paternité doit être écartée, le tout conformément aux stipulations du contrat de gestation pour autrui conclu entre les parties


L’enfant est né 15 août 2019 en Californie


Les parents d’intention demandent l'exequatur du jugement américain et juger que celui-ci produirait les effets d'une adoption plénière.

 

Le jugement de première instance déclare exécutoire sur le territoire français la décision du 5 juin 2019 instituant une filiation entre l'enfant à naître et MM. [N] et [P]. Cette décision est devenue définitive car non frappée d’appel.


La question qui est soulevée dans cet arrêt n’est pas la régularité de la décision étrangère, puisque l’exequatur lui a été octroyé, mais ses effets en France.  


Les époux demandaient que la décision étrangère de la filiation issue d’une GPA produise en France les effets d’une adoption plénière.


La Cour d’appel saisit de cette question, considère que la décision étrangère produira en France les effets d'une adoption plénière.

 

C’est sur ce point que l’arrêt de la Cour d’appel est cassé.

 

La Cour de cassation au visa de l'article 509 du code de procédure civile considère que « lorsque, sans prononcer d'adoption, un jugement étranger établissant la filiation d'un enfant né d'une gestation pour autrui est revêtu de l'exequatur, cette filiation est reconnue en tant que telle en France et produit les effets qui lui sont attachés conformément à la loi applicable à chacun de ces effets ».

 

La Cour de cassation refuse d’assimiler les effets d'une décision étrangère établissant la filiation via une GPA aux effets d'un jugement d’adoption plénière.

 

Il ne pouvait en être autrement.

 

Tout d’abord, il n’y a eu aucun consentement à l’adoption de l’enfant.


Ensuite, la convention de GPA prévoyait que la mère porteuse et son époux, ne seraient pas les parents légaux de l'enfant, qu'ils ne seraient tenus à aucune obligation à son égard et que toute présomption de maternité ou de paternité devait être écartée. N’étant pas la mère légale, elle ne pouvait donc pas consentir à l’adoption de l’enfant.


Enfin, la Convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale ratifiée par la France et les États-Unis, prévoit dans son article 4 – 4 que le consentement de la mère, s'il est requis, ne doit être donné qu'après la naissance de l'enfant. Or en l’espèce, il s’agissait d’un jugement prénatal, antérieur à la naissance de l’enfant.



Surtout, ce serait nier l'efficacité de la décision américaine de lui faire produire en France des effets qu'elle n'a pas prononcé ou même envisagé.


Alors quels sont les effets que va produire en France la décision américaine concernant la filiation de l’enfant vis-à-vis des parents d’intention ? Ces effets seront ceux contenus dans la décision et ceux prévus par la loi américaine.


Comme le précise la Cour de cassation dans une substitution de motif, « cette filiation est reconnue en tant que telle en France et produit les effets qui lui sont attachés conformément à la loi applicable à chacun de ces effets ».


La loi américaine s’appliquera pour l’établissement de la filiation vis-à-vis des parents d’intention.


Les effets de la filiation seront soumis à d’autres règles. Ainsi, concernant la responsabilité parentale, c’est la convention de La Haye du 9 octobre 1996 concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l'exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants qui s’appliquera.



La décision de la Cour de cassation ne peut qu'être approuvée.

 

 

 

 

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